Arrivé à la fin de l'incroyable saison 2 de American Horror Story (dépassant une première saison déjà rutilante), une question trottait dans les esprits : comment arriver à faire mieux que ce capharnaüm infernal, qui semblait représenter l'ultime catalogue du mal ? Difficile à dire. Heureusement, Ryan Murphy prouve une nouvelle fois qu'il ne manque ni de ressources, ni de perversité, pour faire rebondir sa saga horrifique.
Cette saison baptisée sobrement Coven retrouve les grâces de notre époque actuelle : comme d'habitude, les premières images interrogent et bousculent sincèrement, demandant au spectateur de se fondre dans un nouveau moule. Et le changement, toujours déstabilisant, ne s'opère pas aussi facilement que pour Asylum : l'atmosphère de Bradcliff laisse place à à la Miss Robichaux's Acadamy, un décorum ultra épuré, sans doute trop, qui tranche volontairement avec le climat satanique et putride de la précédente saison.
Au cœur de la Nouvelle-Orléans, voici que s'élève cette institution de sorcières, aujourd'hui dépeuplée. Construite après le périple sorcier de Salem, ce « couvent » fut bâtit dans l'espoir de protéger et instruire les magiciennes délaissées par le monde extérieur. Ne pouvant contrôler ses pouvoirs, Zoé, une jeune adolescente, est dépêchée dans l'école, rejoignant ainsi Madison, une étoile d'Hollywood débauchée, Queenie, une « poupée vaudoue humaine », et Abby, une trisomique télépathe.
La plus puissante des sorcières, la « suprême », vient contempler ses nouvelles recrues : à chaque génération, la Suprême actuelle meurt pour laisser place à la suivante. Terrifiée à l'idée de vieillir, Fiona Goode (Jessica Lange, toujours aussi impériale et borderline), l'actuelle représentante des sorcières, ne compte pas laisser sa place aussi facilement. Elle n'hésite pas à toiser sa fille Cordelia, une sorcière amoureuse des plantes déprimée par un mariage sans enfant, et commet l'irréparable dans sa quête contre le temps : elle déterre Delphine Lalaurie, une bourgeoise sanguinaire qui pensait avoir trouver le secret de l'immortalité dans le sang de ses serviteurs.
Pas facile de résumer donc cette saison, dont les péripéties citées plus haut ne représentent qu'un quart de ce qui attend le téléspectateur ! Ainsi, dans sa culpabilité souveraine, la gentille Zoé ressuscitera le garçon de ses rêves, en faisant une sorte de "teenage Frankenstein", Fiona devra se heurter à Marie Laveau, une sorcière vaudou surpuissance, et Misty Day, une sorcière des marécages capable de ramener les morts à la vie, se verra approchée par le couvent. Évidemment, tout cela provoquera apparition de zombies faisant pâlir ceux de Walking Dead, chasseur de sorcières, fanatique religieux, minotaure, et tueur jazzman : toujours un impayable et joyeux bordel !
L'alchimie du casting est toujours au top niveau, mariant les habitués (Lange, Sarah Paulson, Lily Rabe, Denis O'Hare, Taissa Farmiga, Frances Conroy...) et les nouvelles têtes : parmi elles, l'imposante Gabourey "Precious" Sibine, Patti Lupone, Danny Huston, Emma Roberts (qui remporte la palme de la bitch de l'année), et surtout Kathy Bates en Bathory façon south america à la bonhomie trompeuse et au racisme indécent, puis enfin Angela Bassett, offrant un come-back hallucinant en Corona maléfique.
Avec son écriture virevoltante (et parfois en complet free-style, avouons le) Coven brille par son imprévisibilité, fusillant le manichéisme le plus évident : d'un bout à l'autre, tous les personnages sont capables des pires horreurs, se trompant mutuellement comme ils trompent le spectateur. Et malgré des écarts visuels de plus en plus présents (un visuel moins inspiré et enlaidie par des plans tarabiscotés comme un clip des 90's) le show préserve magnifiquement tout ce qui l'anime : une imagerie qui chuchote ses légendes (les réminiscences de Salem et le cadre de la Nouvelle-orléans, terre du jazz et du vaudou, permettant à des mythes comme Laveau, Lalaurie ou Papa Legba de s'intégrer dans le paysage) et assumant pleinement son hybridité (on balance des références à Oz ou Harry Potter, et les chansons de Fleetwood Mac prennent une importance surprenante au cours du récit). C'est toujours aussi grand et fou.
AMERICAN HORROR STORY : MURDER HOUSE
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